2025
Depuis plusieurs années, Charles Fréger, connu pour ses ouvrages dédiés aux mascarades, explore parallèlement le sujet des identités régionales par le biais d’une photographie traitée en silhouette. L’Alsacienne encocardée, le songe de la bretonne en coiffe, le cheval-jupon de l’arrière-pays basque font partie des figures idéalisées d’une imagerie pittoresque, véhiculée par des images d’Épinal ornant des cartes postales, des boîtes de biscuits, de sardines ou de piments. Ce sont ces figures, tantôt muses touristiques, tantôt icônes régionales d’une propagande nationaliste et revancharde sur lesquelles Charles Fréger porte son attention.
Pour ce nouveau chapitre, consacré aux Normandes, il choisit en premier lieu de regarder les coiffes, entreprenant une archéologie des formes conservées en région, dans les vitrines, archives et réserves des musées des Arts et traditions populaires (ATP) initiés par Georges-Henri Rivière dans les années 1940.
À la diversité des coiffes, follement baroques ou discrètement fonctionnelles, se joignent bientôt des outils, « objets singuliers des arts et traditions populaires », traités en silhouette également. Parfois pris dans l’environnement de la réserve du musée, au sein d’une collection particulière ou encore dans les archives des associations et fédérations folkloriques, l’objet révèle le moindre détail de ses contours mais conserve parfois entier le mystère de sa fonction première.
Les rencontres avec les personnes en charge de leur conservation et restauration, les séances de pose avec les danseurs et danseuses nourrissent autant les mises en scène que le dialogue sur ces pratiques tantôt vivantes, tantôt fragiles, parfois disparues. Prenant place dans ce moment suspendu entre passé révolu et résurgences contemporaines, la silhouette photographique propose de sonder, dans les profondeurs de ses noirs, notre lien à cet imaginaire rural de cannes à lait et de labeurs.