Charles Fréger se propose de photographier la totalité des types d’uniformes existants à la Légion Etrangère. A la suite de ce travail d’inventaire, par lequel il obtient l’accès à tous les régiments de Métropole et de Corse, il est autorisé à mener son projet artistique dont l’aboutissement réside dans la série Légionnaires. Celle-ci s’articule en trois ensembles : le premier est consacré aux engagés volontaires, le second au corps dit des pionniers ou sapeurs et le dernier aux uniformes. Les engagés volontaires sont photographiés en buste, le torse nu. Nulle visée érotique dans ce choix, il s’agit d’évoquer la spécificité de la place de l’engagé volontaire au sein de La Légion, soit un homme qui n’est pas encore légionnaire, et qui est soumis à des entraînements intensifs, souvent torse nu. La nudité dit le rapport de force exercé par le corps constitué qu’est La Légion sur celui, en transition identitaire, de l’engagé. Arrivent ensuite les pionniers, photographiés au Fort de Nogent sur Marne, alors qu’ils s’apprêtent à défiler sur les Champs-Élysées pour les commémorations du 14 juillet. Chacun expose sur son tablier de sapeur en cuir des rangées de médailles qui viennent conter leur pedigree. Les légionnaires en tenue suivent, ont été retenus ceux aux uniformes les plus fonctionnels : démineur, pilote de char avec une visée infrarouge ou parachutiste avec outil de transmission. L’uniforme y est oblitérant, à l’image de ce corps d’armée dont la spécificité est de revendiquer une primauté absolue du groupe sur l’individu, graduellement mis au garde à vous.