Merisotakoulu

C’est lors de la traversée entre Stockholm, où il venait d’achever la série Glögg, et Helsinki, où il avait entamé la série Steps, que s’amorce le projet de Merisotakoulu. Lors du voyage, le photographe rencontre des appelés de la marine nationale finlandaise fêtant leur quille le temps d’une « croisière » alcoolisée. À la suite de ce premier contact, il se rend à l’école navale finlandaise, située dans la base de Suomenlinna, une forteresse inspirée par les constructions de Vauban et désormais rattachée au territoire d’Helsinki. Une quinzaine de photographies sont d’abord réalisées au cours de l’hiver 2002, l’essentiel sera effectué pendant le très rude hiver 2003. La température atteint moins 35 degrés, on pourrait atteindre la Russie en marchant sur la glace paraît-il. Au cœur de cette série, il y a le froid et la lumière. Le photographe choisit d’alterner prises de vues en intérieur, parfois devant des peintures réalistes de bateaux ornant les murs de l’académie et en extérieur, dans de grandes étendues blanches immaculées, sur la glace. Les corps, pris dans un uniforme qui se résume à cet épais caban de laine quasi noire, la tête parfois coiffée d’une chapka de fourrure du même ton, sont des rocs gelés. Dans les paysages polaires, seules leurs silhouettes noires se distinguent. Le photographe prend encore ses distances avec son protocole, le corps est saisi de trois quarts, pris dans des mouvements de torsion. Et s’éloignant encore un peu plus, fait entrer dans le cadre le groupe entier, se dirigeant vers l’horizon. Le contraste entre les plans serrés sur ces corps forts et les silhouettes frêles désœuvrées marchant sur la banquise crée une brèche humoristique. Exposant là les dessous de la pose mythologique, le photographe se fait là sémiologue et déconstruit sa propre mise en scène,. C’est autant l’image du marin que l’on voit ici, que celle du portrait perçu comme un espace où le modèle se trouve glacé dans une représentation fantasmée.